MANNO - Manuscrits notés en neumes en Occident

Manuscrits notés en neumes français du département des manuscrits de la Bibliothèque nationale de France (IXe-XIIe siècles)

L’invention des notations musicales occidentales au ixe siècle apparaît comme une conséquence de la réforme du chant des églises gallicanes dès le VIIIe siècle. Elle fut en outre favorisée par la Renaissance des lettres à l’époque carolingienne. Dès l’origine les formes graphiques apparaissent diversifiées. Les familles principales de notation sont distinguées normalement selon leur localisation. Le plus souvent l’emploi d’une graphie signe une appartenance, indique une origine et par conséquent transmet des informations utiles sur l’histoire des textes et des institutions religieuses, dans leur vie liturgique mais aussi intellectuelle. Les textes notés avant la fin du XIIe siècle sont des chants liturgiques, des poésies latines ou des exemples d’application de la théorie musicale.

L’impressionnante quantité de manuscrits notés est le reflet de ces aspects essentiels de la vie des moines et clercs dans la chrétienté médiévale. Ils sont le plus souvent conservés dans les lieux où ils ont été copiés. Le cas de la France est différent, puisque les confiscations révolutionnaires ont eu pour effet le rassemblement des manuscrits liturgiques dans les bibliothèques municipales. La collection de la Bibliothèque nationale de France est encore différente. Remontant au règne de Charles V (1364-1380), elle a été sans cesse enrichie au cours des siècles jusqu’à nos jours par des volumes venus de toutes les régions. Elle présente un échantillon de tous les types de notations musicales, mais principalement de notations dites aquitaines (Sud de la France) et françaises (Nord et centre de la France).

Le domaine des notations françaises est bordé au Nord et au Nord-Est par les notations messines et germaniques. A l’Est il s’étend jusqu’au couloir du Rhône au-delà duquel il rencontre les notations italiennes et sangalliennes. De par son vaste territoire et surtout les influences qu’elle reçoit sur ses limites, la notation française, reconnaissable comme une entité, présente néanmoins de nombreuses variétés dont les collections de la Bibliothèque nationale de France présentent un échantillon significatif. Citons entre autres les scriptoria importants de l’abbaye de Corbie, de Saint-Benoit sur Loire, de Saint-Maur des Fossés.

C’est cette notation qui a été choisie pour la première partie d’un catalogue des manuscrits musicaux du département des Manuscrits de la Bibliothèque nationale de France qui n’avait pas encore fait jusqu’à présent, contrairement aux autres bibliothèques parisiennes spécialisées, l’objet d’une telle monographie. Le catalogage de ces manuscrits notés est ici limité aux premières époques, entre le IXe et le XIIe siècle, ces périodes riches en inventions poétiques et musicales, contemporaines des recherches portant sur la création puis les améliorations possibles de la mise par écrit de chants alors encore transmis oralement.

Les supports sont de grands manuscrits utilisés pour la remémoration du chant au cours de l’année liturgique. Ce sont aussi des fragments ou annotations marginales de textes liturgiques sur des manuscrits profanes. Le repérage de ces témoins révèle donc un pan encore peu connu de l’histoire culturelle médiévale et des origines de notre histoire musicale.


Le recensement des manuscrits notés de la Bibliothèque nationale de France (Marie Noël Colette, Christelle Cazaux-Kowalski, avec la collaboration de Shin Nishimagi, École Pratique des Hautes Études EA 4116) et celui des manuscrits des bibliothèques publiques de France (Christian Meyer, Centre de Médiévistique Jean Schneider, CNRS / MSH-Lorraine / Université Nancy 2) ont été regroupés dans le programme MANNO, qui a été agréé et soutenu par l’Agence nationale de la Recherche. Ce programme, coordonné par Catherine Massip, directeur d’études à l’E.P.H.E., a eu pour partenaires, outre l’E.P.H.E., le département des manuscrits de la BnF (Thierry Delcourt), le Centre de Médiévistique Jean Schneider auprès de l’Université Nancy 2 (Christian Meyer, CNRS) et l’Institut de Recherche et d’Histoire des Textes  (Jean François Goudesenne, CNRS). La BnF a numérisé et mis en lignes les principaux manuscrits concernés par le catalogage.

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